L’Équateur, autrefois reconnu comme un havre de paix en Amérique Latine, est désormais au cœur d’une lutte acharnée contre les gangs de narcotrafiquants. Cette transformation dramatique a été mise en lumière lors des événements du 9 janvier, lorsque des gangs ont orchestré une série d’attaques violentes, marquant ainsi une escalade sans précédent de la violence. Quels sont les racines de cette crise et les défis auxquels le pays est confronté dans sa lutte pour restaurer l’ordre et la sécurité ?
De gangs urbains à cartels mondiaux : L’évolution du crime organisé en Équateur
L’ascension des cartels en Équateur, qui a entraîné une prise de contrôle institutionnelle notable, a ses racines dans divers facteurs économiques et sociaux. Depuis les années 1990, la criminalité organisée en Équateur a évolué de réseaux locaux peu organisés, dominés par des gangs urbains comme les Netas et les Latin Kings, vers une structure de crime organisé complexe et internationalisée. Les premiers groupes, parfois dirigés par des familles comme celles de Telmo Castro et Reyes Torres, ont connu une croissance soutenue, aboutissant à la formation de cartels puissants comme les Choneros.
Le boom des matières premières a initialement apporté la prospérité, mais la chute subséquente de cette économie et le tremblement de terre dévastateur de 2016 ont causé une hausse significative de la pauvreté et des inégalités. Ces circonstances, exacerbées par les mesures d’austérité gouvernementales telles que la suppression de diverses institutions, ont créé un environnement propice à la montée en puissance des organisations criminelles. L’autorité de l’État s’est affaiblie, notamment dans la gestion des prisons, où les détenus ont commencé à être classés et séparés en fonction de leur affiliation « gangstérique ».
Cet affaiblissement a permis aux gangs locaux de se développer en entreprises criminelles multimillionnaires, exploitant l’augmentation de la demande globale de cocaïne. La pandémie de COVID-19 a aggravé cette dynamique en fournissant aux gangs un réservoir de jeunes hommes désespérés, prêts à se joindre à eux pour de l’argent. L’Équateur, stratégiquement situé entre les deux plus grands producteurs de cocaïne, la Colombie et le Pérou, est devenu un couloir privilégié pour le transit de la drogue vers les marchés internationaux.
À partir de 2020, l’assassinat du leader des Choneros, Jorge Luis Zambrano, alias « JL », a déclenché une atomisation du crime organisé, avec des gangs se divisant et engendrant une vague de violence inédite. En 2021 et au-delà, l’organigramme criminel s’est complexifié, avec une réorganisation menant à des alliances claires entre les cartels locaux comme les Choneros et Águilas et des entités criminelles internationales, y compris le cartel de Sinaloa et la mafia albanaise, ainsi que des groupes comme les Lobos et les Latin Kings, signalant une étape d’internationalisation profonde du crime organisé dans le pays.
En 2023, cette internationalisation du crime organisé en Équateur est pleinement opérationnelle. Alors que le gouvernement lutte pour reprendre le contrôle, la question demeure : les institutions équatoriennes pourront-elles surmonter ces réseaux criminels de plus en plus sophistiqués et interconnectés ?
État d’urgence en Équateur : entre assaut militaire contre la loi des cartels
Face à l’escalade de la violence et à l’infiltration des gangs dans les structures de l’État, le gouvernement équatorien a été contraint d’agir. Le 9 janvier, en réponse à des attaques coordonnées, le président Daniel Noboa a signé une déclaration de « conflit armé interne », permettant le déploiement de l’armée pour rétablir l’ordre, notamment dans les prisons. Cette mesure extrême a souligné l’ampleur du problème, mais aussi les défis considérables auxquels le gouvernement doit faire face pour démanteler ces réseaux criminels profondément enracinés.
Les prisons, qui servaient de centres de commandement pour les gangs, ont été l’objet de violentes batailles pour le contrôle du territoire, entraînant des massacres entre gangs rivaux. En dépit des efforts pour isoler les chefs de gang dans de nouvelles installations de haute sécurité, les alliances entre gangs rivaux lors des attaques du 9 janvier ont montré une capacité de coordination et de résistance qui continue de défier les efforts de l’État pour rétablir le contrôle.
L’Équateur et son combat déterminé contre le narcotrafic pour une stabilité future
L’Équateur se trouve à un carrefour critique. Les mesures prises par le gouvernement ont montré une volonté ferme de lutter contre le narcotrafic et le crime organisé, mais la route vers la stabilité reste semée d’embûches. Les implications de ces conflits ne se limitent pas aux frontières de l’Équateur ; elles affectent la stabilité régionale et posent des questions sur l’efficacité des politiques de lutte contre le narcotrafic en Amérique Latine. Seul le temps dira si les institutions équatoriennes pourront surmonter ces défis, ou si le pays risque de sombrer dans une instabilité plus profonde. Mais il est certain que grâce au peuple équatorien le pays se relèvera et retrouvera sa superbe d’antan.