Ce lundi 21 avril 2025, le pape François est mort.
À 88 ans, il s’est éteint dans le silence feutré de la Domus Sanctae Marthae, sa résidence au Vatican. Une mort sans faste, sans cérémonie anticipée. Une mort fidèle à ce qu’il a été : un pape du dépouillement, de l’essentiel, de la foi vécue à hauteur d’homme.
Mais ce départ n’est pas un fait anodin.
Il survient au lendemain de Pâques, la fête qui célèbre dans le christianisme la victoire de la vie sur la mort. Et cela, pour les croyants comme pour les curieux du sens, mérite qu’on s’y arrête.
Un dernier souffle dans le sillage de la Résurrection
Mourir un lundi de Pâques, ce n’est pas une mise en scène.
Ce n’est pas une stratégie de communication divine.
Mais pour un pape qui n’a cessé de parler d’espérance, de relèvement, de miséricorde… c’est un timing qui interroge.
La Résurrection du Christ, célébrée la veille, est au cœur du dogme chrétien. Elle proclame que la mort n’est pas la fin, mais un passage. Qu’au plus noir de l’échec, une lumière peut jaillir. En ce sens, la mort de François n’interrompt pas un règne : elle l’accomplit. Il quitte ce monde au moment où l’Église proclame que la vie l’emporte, envers et contre tout.
Une cohérence entre la vie et le départ
François ne croyait pas aux grands discours. Il leur préférait les gestes concrets, souvent minuscules, mais porteurs d’un souffle profond. Il a réconcilié le trône de Pierre avec les périphéries du monde. Il a donné de la voix aux invisibles, aux réfugiés, aux victimes d’abus, aux oubliés des dogmes.
Il a refusé les dorures, mais pas les responsabilités.
Et le voilà qui meurt sans bruit, dans l’après de la Résurrection, comme un point final modeste à une vie de rupture douce. Un départ à la manière d’un Évangile : sobre, et pourtant traversé d’une force intérieure.
Une Église qui s’est accrue sous son pontificat
Quand le Pape François arrive en 2013, l’Église catholique compte 1,254 milliard de fidèles. En 2023, ils sont 1,406 milliard, soit 152 millions de plus, mais la carte a changé.
La croissance vient de l’Afrique (+3,31 % en 2023), de l’Asie, et de certaines régions d’Amérique du Sud. L’Europe, elle, connaît une lente érosion.
Mais le message reste global : le catholicisme n’est pas en déclin, il se déplace. Et François l’avait compris avant beaucoup d’autres.
Un pape qui interroge même en mourant
Le philosophe verrait ici une belle ironie du sort. Le croyant y lira peut-être un clin d’œil de la Providence. L’Église, elle, devra se poser une question très simple :
et maintenant ?
Car en mourant le jour où l’on proclame que « la mort est vaincue », François rappelle à l’institution ce qu’il n’a cessé de marteler :
« Le pouvoir n’est pas le centre. La foi n’est pas une forteresse. L’Église n’est pas un musée. »
Pape François
C’est un temps suspendu : le Christ est ressuscité, le pape est mort, et l’Église doit choisir entre rester figée ou renaître elle aussi.
La mort de François un lundi de Pâques, ce n’est pas un dogme, ce n’est pas un miracle.
Mais c’est peut-être un signe pour l’intelligence croyante, pour ceux qui cherchent du sens sans vouloir forcer Dieu à parler.
Et si ce n’était pas un message… mais une question ?
« Et toi, que fais-tu de la vie, maintenant que la mort a été traversée ? »
Une mort sans miracle, mais pas sans sens
Il ne faut pas chercher ici un miracle.
Mais peut-être un appel, silencieux mais puissant, à sortir des tombeaux intérieurs. Ceux de la peur, de l’orgueil, du dogme comme carapace.
Elle est en mouvement ou elle est morte. Elle est debout auprès des plus faibles, ou à genoux devant ses habitudes.
Une Église qui enterre son chef dans la lumière pascale : un appel à la réforme jusqu’au bout.
François a voulu une Église plus pauvre, plus proche, plus vulnérable. Sa mort au matin de la Résurrection peut être vue comme une mise au défi adressée à l’institution :
Et maintenant ? Allez-vous continuer le chemin que j’ai tenté de tracer, ou retourner au confort des palais ?
Car si le pape peut mourir un lundi de Pâques, c’est que l’Église peut aussi choisir de renaître.
François s’en va sans vacarme. Mais il laisse un vide peuplé de questions.
Et c’est peut-être cela, au fond, le plus beau des héritages : ne pas imposer une réponse, mais réveiller les consciences.