Coke en stock : les fleuves sud-américains deviennent des autoroutes de la cocaïne Coke en stock : les fleuves sud-américains deviennent des autoroutes de la cocaïne

Coke en stock : les fleuves sud-américains deviennent des autoroutes de la cocaïne

Paraguay-Paraná, le Mississippi des cartels

Imaginez un fleuve géant, bordé de ports et sillonné par des barges chargées de soja et de sucre. La voie Paraguay-Paraná, longue de 3 400 kilomètres, traverse cinq pays – Brésil, Bolivie, Paraguay, Argentine et Uruguay – reliant les terres agricoles aux marchés mondiaux. Si elle devait incarner le progrès économique, elle est aujourd’hui une artère cruciale du narcotrafic. Les conteneurs qui voguent sur ses eaux transportent bien plus que des produits légitimes : des tonnes de cocaïne s’y cachent, prêtes à envahir les marchés européens.

En Uruguay, ce problème prend une ampleur particulière. Avec son port de Montevideo, dernier point d’escale avant l’Atlantique, le pays est devenu un pivot stratégique. L’explosion du trafic de conteneurs dans cette petite nation a offert aux cartels des opportunités sans précédent. En mai 2023, une cargaison de 12 tonnes de cocaïne, partie d’Asunción et transitant par Montevideo, a été interceptée à Hambourg. Malgré l’embarras causé par cette découverte, les autorités uruguayennes peinent à suivre le rythme des trafiquants, bien souvent plus rapides et mieux financés.

Port d'Asunción : trafic de Cocaïne

L’illusion technologique face à des cartels agiles

L’arrivée de scanners modernes dans les ports paraguayens, souvent achetés avec l’aide d’alliés internationaux comme Taïwan, devait marquer un tournant. Mais la sophistication des trafiquants dépasse de loin les espoirs technologiques. Ces derniers mélangent la cocaïne à des produits comme le sucre ou le sésame noir, déjouant les appareils censés détecter la drogue. En Uruguay, les scanners ne sont pas infaillibles non plus, et l’énorme flux commercial du port de Montevideo en fait un point vulnérable.

Le rôle de l’Uruguay dans cette chaîne logistique n’est pas qu’accidentel. Montevideo, situé sur l’embouchure du Río de la Plata, est un hub où les conteneurs sont transbordés avant de rejoindre les navires transatlantiques. Alors que le Paraguay sert de point d’origine, l’Uruguay devient la dernière étape avant l’Europe. Mais ici, comme ailleurs, la technologie se heurte à une organisation policière souvent dépassée et à des gangs internationaux qui exploitent les failles.

Montevideo, nouveau carrefour du transit de la coca ?

Le port de Montevideo est à la fois une fierté nationale et un cauchemar sécuritaire. Avec son infrastructure moderne et son ouverture sur l’océan, il attire des cargaisons légales comme illégales. L’Uruguay, pourtant petit pays de 3,5 millions d’habitants, se retrouve au cœur d’un réseau criminel mondial. Alors que les conteneurs remplis de soja ou de viande se mélangent à ceux contenant de la cocaïne, Montevideo devient un symbole des limites de la lutte anti-drogue.

Cette position stratégique rend l’Uruguay particulièrement exposé. En 2022, des cargaisons de drogue dissimulées dans des produits agricoles ont été saisies à Montevideo et dans des ports européens après avoir transité par le pays. La situation est aggravée par des liens suspects entre certains acteurs économiques locaux et les cartels internationaux. Pour le président uruguayen, le défi est immense : il faut préserver l’image d’un pays stable tout en menant une lutte coûteuse contre des organisations mieux armées et financées.

Du Paraguay à l’Uruguay, en passant par l’Argentine, la voie fluviale Paraguay-Paraná est devenue une véritable autoroute de la cocaïne. Montevideo, dernier rempart avant l’Europe, incarne à lui seul le défi des nations sud-américaines face à des cartels en constante mutation. À mesure que la demande mondiale de cocaïne croît, les ports et les fleuves de la région ne cessent d’être le théâtre d’un affrontement inégal entre le commerce légal et le crime organisé.

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